Hector Carballo, le monarque français à la sauce espagnole

A l’occasion de la semaine dédiée à la série Isabel qui s’achève le 1er décembre, nous vous proposons une interview exclusive de l’acteur Hector Carballo. Ce dernier  interprète le roi de France Charles VIII pendant la première partie de la saison 3. 

10506727_10152553446747938_5489659724824846443_oHector Carballo est le roi de France :

1. Dans la série Isabel, tu interprètes le roi de France Charles VIII qui est en conflit avec les rois catholiques? Qu’est ce que ça fait de jouer un roi?
Interpréter un roi, ce n’est pas différent d’un autre personnage. Cela n’a pas d’importance de jouer un roi, un domestique, un avocat ou un maçon. Mon travail d’acteur est de le connaître pour pouvoir l’interpréter correctement. Le scénario est le roi, mais les clés ce sont les compagnons de scène. En effet, la façon dont ils se comportent lors des scènes déterminent ma position. Un acteur qui incline sa tête quand j’entre dans la salle du trône est ce qui me fait paraître roi. Je n’ai qu’à entrer. C’est pour cette raison que je dis toujours qu’un personnage se construit aussi avec les autres acteurs.

2. Comment as-tu préparé ce rôle?
Quand Jordi Frades, le réalisateur de la série m’a offert ce rôle, il avait une idée précise de ce qu’il voulait montrer du personnage de Charles VIII. Il m’a envoyé des informations sur le parcours du roi et sur ses problèmes physiques et psychologiques. Il avait un parkinson qui paralysait des parties de son corps et qui faisait que sa tête avait sa propre autonomie (on ne savait pas s’il répondait de façon négative ou positive). La légende dit qu’il avait six doigts sur chaque pied, mais surtout il était mentalement très instable… Avec ça, tu as déjà assez de données pour faire une composition physique et une attitude du personnage. J’ai commencé à chercher des informations sur sa vie et les faits historiques de son règne.

Au final, le plus important est de raconter ce qui est écrit dans le scénario. Nous avons aussi travaillé quelques jours avec le directeur et mes compagnons de scènes dont José Perdo Carrión (Luis).

Un personnage instable :

3. As-tu des points communs avec Charles VIII?
Heureusement pour moi, non. Je crois que j’aurais de graves problèmes si je lui ressemblais.
Évidemment, dans tous les personnages tu mets quelque chose de toi, parce que tu l’interprètes. Mais je crois que c’est le rôle le plus éloigné de moi que j’ai interprété. C’est l’une des choses qui m’a  le plus attiré dans le roi de la France. Il m’a permis de me mettre à la peau de quelqu’un de très différent des rôles que j’ai l’habitude de jouer. Un être méprisable qu’on ne voudrait pas approcher, comme un peu tous les rois de cette série. Une ambition et une cruauté les gagnent tous : des rois catholiques à Charles VIII en passant par Juan du Portugal. La différence consiste en ce que dans une série de fiction il y a le bon et le malin.

4. Est ce que ça te stresse de savoir que la série est suivie par des français?
La pression ce n’est pas le mot. Un respect m’envahi. J’essaye toujours de faire du mieux que je peux, mais je ne peux pas éviter de me demander de temps en temps : « est ce que je le fais bien? »
Comme je l’ai dit auparavant, dans cette série les protagonistes sont les Rois Catholiques et par conséquent ce sont les « bons ».
Charles VIII est l’antagoniste (l’ennemi) un « Malin », on a surtout une vision négative de lui. Isabel l’avait aussi et Charles était aussi connu comme quelqu’un de courtois. Je reconnais qu’une fois je me suis demandée : « qu’est-ce que les français pensent de cette vision négative que nous montrons de Charles VIII ? J’espère qu’ils ne sont pas agacés.

Un bon environnement de tournage :

5. Quelle est ta scène préférée?
Ça dépend. La scène que j’ai préféré tourner est celle où Fernando Guillén Cuervo (Fuensalida) vient parler aux français du traité signé à Barcelone. En effet, Charles VIII raille avec la plume (stylo) l’une des clauses signées parce qu’il a changé d’opinion. Pour moi, c’était très amusant de jouer cette scène. Fernando Guillén est très sympathique et génère sur le plateau une très bonne énergie. En résumé, tout s’est très bien passé, mais je dois reconnaître qu’après avoir vu les épisodes à la télévision, il y a une autre séquence que j’aime beaucoup. Il s’agit de celle durant laquelle Charles menace avec une épée le Papa Alejandro Borja au Vatican. Je crois que c’est un acte clé dans l’histoire de mon personnage et l’ensemble (la musique, le montage, la photographie, la direction et le scénario) s’assemble à la perfection.

6. Dans la série, on change souvent de pays, mais la langue ne change pas. Pourquoi quelles raisons?
Je crois que la décision a été prise pour faciliter les choses. C’est un terrain délicat car d’un côté le français, le catalan, le portugais ou l’anglais d’aujourd’hui sont différents des langues de l’époque.
Et d’un autre côté, c’est aussi un sujet de débat de parler avec certitude le langage qu’ils utilisaient dans les cours pour s’exprimer entre eux, et même à l’intérieur de leurs propres cours. Les faire parler la même langue permet de contourner cette difficulté. Les textes sont soignés sur le plan lexical. Tous les scénarios sont envoyés à l’Académie Royale de la Langue Espagnole pour qu’elle donne son aval.

La langue de Molière :

7. Est-ce difficile d’interpréter un personnage historique ? Pourquoi ?
Ce n’est pas plus difficile que d’interpréter un personnage qui n’est pas historique. Sur le fond, notre travail est d’entendre le personnage et d’être crédible et logique dans les situations. Je crois qu’écrire rôle historique est plus compliqué. Lorsque l’on a un bon scénario, avec des personnages si bien définis, notre travail semble plus simple. Par conséquent, notre obligation n’est pas d’incarner le personnage historique, sinon la personne qui existe derrière.

8. Parles-tu français ?
Pas aussi bien que je le voudrais. Depuis l’adolescence, le français m’enchante. D’ailleurs, je l’ai étudié quatre ans dans un institut. Mais, je l’ai réellement appris durant le Festival d’Avignon. C’était une expérience géniale. J’ai toujours le désir d’améliorer mon français. Je n’ai pas un niveau très haut, mais il est meilleur que mon Anglais.

Un acteur qui se dédie au théâtre :

9. Quels sont tes projets maintenant que la série touche à sa fin ?
En ce moment, je suis au théâtre et c’est ce que j’aime le plus. Je suis en tournée en Espagne pour la pièce Otelo de W. Shakespeare. Je commencerais bientôt à travailler sur une autre oeuvre anglaise, El Mercader de Venicia. De plus, début 2015, je serais à Madrid pour une saison avec le montage de El caballero de Olmedo (pas celui de Lope, l’autre) de Monteser avec la compagnie Los Otros, dont je suis le co-fondateur.

10. Aimerais-tu interpréter un autre personnage historique?
Bien sûr, j’adorerais. Pour un acteur, c’est une très bonne expérience.

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