Legado était l’une des séries espagnoles les plus attendues de l’année. Avec José Coronado dans le rôle du patriarche et un casting cinq étoiles, cette fresque familiale mêlant héritage et mensonges semblait promise au top 1 de Netflix. Et pourtant, la fiction divise. Top ou flop ? La série méritait-elle mieux ? On a pris le temps de la regarder pour vous donner un avis étayé.

Présentée comme l’un des projets phares de Netflix Espagne, Legado réunit tous les ingrédients d’un succès annoncé : un acteur emblématique, une intrigue centrée sur les tensions familiales, et une réalisation soignée. José Coronado y incarne un patriarche cynique à la tête d’un empire médiatique, prêt à tout pour reprendre le contrôle face à des enfants qui, selon lui, dénaturent son héritage.
Mais très vite, la série a quitté le top 10 de la plateforme, et les retours spectateurs se sont avérés extrêmement partagés. Est-ce la série qui n’était pas à la hauteur des attentes, ou est-ce le signe d’un essoufflement de l’engouement pour les fictions « made in Spain » ? Une question à laquelle il n’est pas si simple de répondre.
Legado : Une famille qui se déchire autour d’un héritage
La production et le créateur, notamment Carlos Montero ont présenté Legado comme d’une série originale inspirée par des dynamiques familiales classiques autour du pouvoir et de la richesse, un genre qu’on retrouve dans de nombreuses fictions.
Synopsis : Federico Seligman (José Coronado), à la tête de sociétés de communication, s’est retiré des affaires pendant deux ans pour se remettre d’une maladie qui l’empêchait d’être aux commandes. À son retour, il découvre que ses fils, devenus des étrangers, ont donné à ses activités une orientation qu’il exècre. Federico décide alors de faire tout son possible pour éviter que ses enfants détruisent son héritage.
Legado est une série qui dresse le portrait d’une famille aisée en apparence unie autour d’un patriarche malade qui aurait toujours agit pour eux. Toutefois, au fil des épisodes, le récit laisse entrevoir que des conflits, des rivalités et des problématiques qui nous emmènent dans les coulisses d’une famille qui est plutôt sordide et qui met en péril le fameux héritage de cette dynastie de la presse.
Une série portée par José Coronado qui était très attendue.
Dès sa sortie, Legado a été comparée à la série culte Succession, en raison de thématiques similaires : famille puissante, héritage, jeux de pouvoir. Une analogie flatteuse mais peut-être encombrante. Là où Succession brillait par ses dialogues incisifs et son humour noir, Legado adopte un ton plus solennel, parfois trop appuyé.
José Coronado, star de Netflix notamment grâce à Entrevías, incarne ici un personnage plus froid, manipulateur et difficile à cerner. Un rôle qui tranche avec ses performances passées et qui, s’il a séduit la critique, a laissé certains fans sur leur faim, peu enclins à s’attacher à ce nouveau visage.
Au-delà de la performance de José Coronado, Legado s’appuie sur un casting équilibré mêlant visages familiers et jeunes talents du cinéma espagnol. Belén Cuesta, remarquée dans La Casa de Papel et Paquita Salas, incarne avec force et subtilité Lara Seligman, un personnage à la fois vulnérable et déterminé, dont la présence magnétique donne du relief à chaque scène. À ses côtés, Diego Martín, acteur chevronné vu dans Élite et Velvet, apporte à Andrés Seligman une intensité contenue qui alimente les tensions souterraines du récit.
La nouvelle génération n’est pas en reste : Natalia Huarte, révélation saluée par un Prix Max, insuffle fraîcheur et complexité au personnage de Guadalupe, tandis que María Morera, en pleine ascension, campe avec justesse la benjamine du clan, oscillant entre loyauté familiale et quête d’émancipation.
Ce savant mélange de générations crée une dynamique intéressante, à la fois familière et renouvelée. Néanmoins, malgré la qualité des interprétations, certains rôles secondaires peinent à trouver leur place face à l’omniprésence de Coronado, dont la figure écrasante tend parfois à déséquilibrer l’ensemble.
Un mélange des genres qui sème le trouble :
Si Legado se présente d’abord comme une saga familiale classique, centrée sur les luttes de pouvoir internes à un clan influent, elle s’avère bien plus que cela. En filigrane, la série brosse un portrait acerbe d’un système corrompu où tout ou presque est lié : les affaires, les médias, le pouvoir politique. Le patriarche Federico Seligman n’est pas seulement un magnat de la presse, c’est aussi un homme de réseau, proche de ministres, détenteur de secrets capables d’ébranler des institutions. Lorsque sa propre famille se retourne contre lui, ce n’est pas seulement une affaire d’héritage, mais une question de survie dans un système où l’information est une arme, et où ceux qui savent trop deviennent des cibles.
Legado ambitionne ainsi de dépasser le simple cadre domestique pour explorer les ramifications d’un pouvoir tentaculaire. En ce sens, elle s’inscrit dans une tradition de fiction politique, dénonçant en creux les dérives de certaines élites et les compromissions d’un modèle où tout se tient et où la loyauté familiale devient une valeur bien relative. Cette dimension plus profonde, souvent éclipsée par la comparaison avec Succession, pourrait justement être la clé de son écho international : en révélant les liens troubles entre pouvoir, médias et politique, Legado parle d’un système que beaucoup reconnaîtront, bien au-delà des frontières espagnoles.
La complexité du récit :
Si Legado cherche à se démarquer par sa profondeur et sa complexité, c’est peut-être justement cette ambition narrative qui la rend difficile d’accès pour une partie du public. Le premier épisode, par exemple, s’ouvre sur une façade de famille unie, presque idéalisée, pour mieux en démonter les apparences dès les scènes suivantes. Mais cette déconstruction progressive, qui pourrait être passionnante, se perd parfois dans un enchevêtrement de trames trop nombreuses. Entre le patriarche cynique qui découvre la trahison des siens, les enfants ligués pour protéger un lourd secret, les rivalités souterraines, les ambitions personnelles, ou encore la benjamine issue d’un autre mariage qui vit en marge du clan, la série multiplie les pistes… sans toujours leur donner le temps de respirer.
Chaque personnage possède son propre arc, souvent dense, parfois complexe, mais faute d’un véritable fil rouge émotionnel ou d’une ligne claire, le spectateur peine à s’attacher ou à se projeter. À force de vouloir tout dire, Legado finit par perdre un peu de lisibilité, ce qui nuit à l’immersion. Cette dispersion narrative pourrait expliquer pourquoi la série, malgré ses qualités, n’a pas réussi à s’imposer durablement dans le top de Netflix : elle demande un certain effort d’attention dès le départ, sans offrir immédiatement le retour émotionnel ou dramatique que certains spectateurs attendent d’une série familiale.
La critique de la rédaction :
Legado est une série qui ne manque ni d’atouts, ni d’ambition. Son casting est solide, avec des performances bien menées, une mise en scène soignée, et une volonté claire de casser les codes des séries espagnoles traditionnelles. Elle s’empare de thèmes forts – le pouvoir, la famille, la corruption – et tente d’en proposer une lecture moderne, presque politique. Oui, certains y verront des parallèles avec Succession, mais pour ma part, ne connaissant pas assez cette référence, je préfère juger Legado pour ce qu’elle est : une série dense, riche en matière.
Ce qui lui fait défaut, c’est sans doute sa mise en forme. L’intrigue aurait gagné à être recentrée, à donner plus de temps à chaque personnage pour exister. Il y a une vraie envie de proposer quelque chose de complexe, mais à force d’empiler les sous-intrigues, la narration finit par se diluer. Et peut-être aussi que les attentes étaient trop élevées, dans un contexte où de nombreuses séries sortent chaque semaine. Cela dit, Legado reste une proposition intéressante, avec des idées fortes. Une série qui mérite qu’on prenne le temps de s’y plonger… à condition de ne pas chercher un récit simple et linéaire, mais plutôt une fresque trouble et nuancée.