Eugenio Derbez : du rire mexicain aux émotions universelles leçons d’une Keynote à Iberseries Platino Industria

Eugenio Derbez, comédien, producteur et scénariste mexicain, a captivé l’audience lors de sa K-note à Iberseries Platino Industria. Retour sur une masterclass où il dévoile ses secrets pour conquérir le public mondial et réussir la transition de la comédie mexicaine au cinéma international.

Eugenio Derbez : du rire mexicain aux émotions universelles  leçons d’une Keynote à Iberseries Platino Industria
Eugenio Derbez : du rire mexicain aux émotions universelles leçons d’une Keynote à Iberseries Platino Industria

Pour les amateurs de productions hispaniques, le nom d’Eugenio Derbez résonne immédiatement. Comédien emblématique de la télévision mexicaine, connu pour son humour incisif et exagéré, il est aussi un producteur reconnu ayant réussi à s’imposer aux États-Unis. Pourtant, sur le continent européen, sa notoriété reste encore méconnue.

Lors de sa Keynote à Iberseries Platino Industria, Eugenio Derbez a offert une rare plongée dans sa carrière, ses méthodes de création et sa vision du cinéma et de la comédie. Pendant près de cinquante minutes, il a partagé anecdotes et réflexions, avec une franchise et une sensibilité qui traduisent bien le mélange unique d’humour et de profondeur qui le caractérise.

1. Eugenio Derbez : la naissance des idées et leur universalité

Eugenio Derbez n’est pas seulement un acteur emblématique de la comédie mexicaine ; c’est aussi un producteur de renom. Depuis plusieurs années, il est à l’affiche de nombreux films et séries, notamment aux États-Unis, tout en produisant son propre contenu. Récemment, il a co-produit la série Acapulco, disponible sur Apple TV, et a enchaîné avec d’autres projets internationaux, démontrant sa capacité à créer et à porter des histoires qui voyagent au-delà des frontières. Créer une idée n’est jamais simple, surtout lorsque l’on vise un public mondial. Aujourd’hui, avec les plateformes qui diffusent instantanément dans le monde entier, il ne suffit plus de connaître son public local.

« On te raconte ce qui leur est arrivé hier, un accident, et tout le monde croit que ça peut devenir un film ou une série. Parfois, ils ont raison. Alors, comment savoir si une idée est bonne ou non ? Je crois que c’est la partie la plus compliquée. Ce qui fait qu’une idée voyage, c’est l’émotion. Peu importe le thème, si le spectateur peut se connecter émotionnellement à l’histoire, alors c’est une histoire qui peut toucher le monde entier. »

Il prend l’exemple d’E.T. : un extraterrestre et un enfant deviennent amis, et c’est cette relation qui fait pleurer les spectateurs, peu importe leur culture.

https://youtu.be/vJrWIj_tiZY?si=JW8oeXjpG1731gFu

2. L’arrivée aux États-Unis : un tournant à 52 ans

« Quand je suis arrivé aux États-Unis, j’ai dû me réinventer parce que tout mon humour était basé sur les jeux de mots. La comédie latino est très exagérée, avec des gestes et des expressions fortes… mais aux États-Unis, c’est l’inverse.

À 52 ans, au sommet de son succès au Mexique après 25 ans de carrière, Eugenio Derbez prend une décision radicale : fermer son entreprise et tenter sa chance aux États-Unis. Un déclic survient après un programme qui rencontre un grand succès, et ses agents lui lancent un ultimatum : « Soit tu pars maintenant aux États-Unis, soit tu ne le feras jamais. » Alors il choisi de tout quitter pour tout recommencer. Il commence alors à faire le tour des émissions américaines, espérant faire valoir sa carrière et ses succès mexicains. Mais le choc est brutal :

Les producteurs lui reprochent souvent que ses projets sont « too Mexican ». Il raconte même sa plus grande erreur : présenter sa série La Familia Peluche aux producteurs américains : Sa réponse :

« Et alors ? Il n’y a rien de plus américain qu’un film américaine et pourtant ça fonctionne. Dans toute l’Amérique latine, nous n’avons jamais vu de fusée, à part en photo. Pourtant, des films comme Apollo 13 ou Erin Brockovich ont touché le monde entier, avec des histoires très locales. »

C’est le début d’une période où Eugenio Derbez doit réinventer son humour, sa manière de raconter des histoires, et apprendre à séduire un public international. Au Mexique, Eugenio Derbez est un maître de la comédie, avec un style exagéré : jeux de mots, mimiques, cris et couleurs. Mais il découvre vite que ce style ne “voyage” pas. Pour lui, l’humour universel reste l’un des défis les plus difficiles à relever.

3. L’authenticité et le bilinguisme au cinéma

Eugenio Derbez se bat depuis des années pour la valorisation de la culture latine et de la langue espagnole. Celui qui a créé le débat en critiquant l’espagnol de Selena Gomez dans le film Emilia Perez raconte aussi sa bataille pour que ses films reflètent la réalité linguistique et culturelle des personnages mexicains :

« On se moquait quand on allait voir un film de James Bond ou de Rambo, et que partout dans le monde tout le monde parlait anglais. Ça n’est pas vrai ! Alors nous avons décidé : dans mes films, tout ce qui est en espagnol sera en espagnol. À moins qu’ils soient nés aux États-Unis, mais s’ils viennent du Mexique, ils parlent espagnol. C’était un combat terrible avec les studios, mais je voulais que ce soit authentique»

Même lorsqu’il travaillait avec Salma Hayek, il a refusé que deux Mexicains parlant entre eux à l’écran utilisent l’anglais. Pour lui, ce bilinguisme reflète la vraie vie : aux États-Unis, les Latinos passent naturellement de l’espagnol à l’anglais selon le contexte. Cette approche a non seulement respecté la culture, mais a également été saluée par le public et a fait le lui le pionnier des fiction en spanglish !

« Tout le monde nous disait : ‘C’est magnifique, ça coule très bien.’ Nous avons toujours cherché à être authentiques, et c’est une des choses dont je suis le plus fier. »

4. Mettre en avant les récits oubliés :

Eugenio Derbez continue de montrer comment les créateurs latino-américains peuvent se distinguer sur la scène internationale. Il est actuellement en tête d’affiche de la série Y Llegaron de Noche, nominée aux Emmy International. La série s’inspire d’un fait historique méconnu : un groupe d’outsiders latinos a réalisé la version espagnole du classique de l’horreur Dracula de 1930, acclamée par la critique américaine, mais oubliée pendant des décennies.

« Presque personne ne sait que les mexicains ont proposé leur version de Dracula. Le tournage se faisait la nuit, d’où le nom de la série, pas à cause des vampires. Ils ont utilisé les mêmes décors, les mêmes costumes, tout, mais avec la moitié du budget. Ils ont fait les deux films, et tous les critiques hollywoodiens ont convenu que la version espagnole était meilleure. »

La version espagnole a été distribuée en Amérique latine, puis retirée afin de ne pas faire concurrence à l’original américain. Elle est restée cachée jusqu’aux années 1970, jusqu’à ce qu’une copie soit retrouvée dans un sous-sol à Cuba. Ce récit historique a inspiré Derbez :

« Deux scénaristes américains m’ont apporté l’histoire. Et ça montre que quand les Latinos… nous sommes habitués à faire des merveilles avec presque rien. C’est un avantage que nous avons en tant que Latinos, nous sommes habitués à faire beaucoup avec peu»

La série est aujourd’hui disponible sur VIX et Amazon, avec une production qui rivalise visuellement avec les standards nord-américains, mais réalisée avec une efficacité et un budget que seuls les Latinos savent manier.

5. Passer du comique au dramatique : la reconnaissance internationale

« Grâce à la comédie, j’ai fait toute ma carrière. Mais quand j’ai voulu faire autre chose, tout le monde me disait : ‘Eugenio, fais La Familia Peluche, fais tes personnages’. »

Eugenio Derbez met douze ans à développer No se aceptan devoluciones, la comédie dramatique qui lui ouvre enfin les portes d’Hollywood. Puis, avec Radical, un drame longtemps bloqué par les investisseurs, il connaît un succès historique au Mexique.

« Ironiquement, le drame devient le genre le plus rentable pour moi, et tout le monde commence à me respecter. Avant, j’étais le ‘chistoso de la télé’. Maintenant, je suis le monsieur acteur. »

Cette trajectoire explique pourquoi des comédiens comme Tom Hanks, Robin Williams ou Jim Carrey ont basculé vers le drame : la reconnaissance et les prix viennent souvent après avoir quitté le registre comique.

Eugenio Derbez est l’un des comédiens mexicains qui a le mieux réussi sur la scène internationale et qui continue de faire voyager son art comme vous pourrez le constater sur son compte instagram.

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